25.05.2022
La Médecine nucléaire est une discipline encore peu connue, avec moins de 1% de médecins qui choisissent cette spécialité. Nous sommes partis à la découverte de cette spécialisation, avec le Dr Antoine Leimgruber, Médecin Nucléaire à la Clinique de Genolier.
La Médecine nucléaire est la branche médicale qui a comme particularité l’utilisation de sources radioactives non-scellées, c’est-à-dire sous forme liquide, avalable ou injectable.
En Médecine nucléaire, des atomes radioactifs sont fixés à des molécules dotées de propriétés spécifiques de localisation dans le corps. Ces produits "radio-pharmaceutiques" sont utilisés à des fins diagnostiques ou thérapeutiques. Par exemple, certaines molécules se fixent dans un type spécifique de cancer et alors que d'autres se déposent dans le cerveau en cas de maladie d’Alzheimer.
L’utilisation de ces substances permet ainsi la pose d'un diagnostic, le contrôle de l’évolution de maladies ou l’irradiation thérapeutique d’une région spécifique.
La Médecine nucléaire a des similarités avec la Radiologie, l’Oncologie médicale et la Radiooncologie, et peut répondre à d’autres questions dans des domaines comme l’Orthopédie, l’Urologie ou la Neurologie, par exemple pour le diagnostic des démences et d’Alzheimer. Elle a aussi acquis ses lettres de noblesse en cardiologie.
Non, car la Médecine nucléaire a d’abord été thérapeutique. Il y a plus de 80 ans, Saul Hertz aux Etats-Unis a eu l’idée d’utiliser l’iode radioactif, qui se dépose dans la thyroïde, pour traiter les cancers ou les hyperfonctionnements de celle-ci. Sa découverte a d’abord été volée, puis reconnue sur le tard. Marie Curie a découvert le Radium et c'est plus de cent ans plus tard qu'il a également été autorisé en pratique médicale pour le traitement de lésions osseuses douloureuses.
Par la suite, avec le développement des technologies en imagerie médicale, elle est devenue une discipline diagnostique. Contrairement à la Radiologie, la Médecine nucléaire permet la réalisation d'imagerie de la fonction ou de la biologie, plus que de l’anatomie.
Le domaine du diagnostic a occupé beaucoup de place dans les 20 à 30 dernières années. Puis, grâce aux développements des compétences en Chimie, en Radiochimie et en Biologie moléculaire, de nouvelles molécules ont été développées, ce qui a permis d’augmenter l’arsenal de traitement disponible, particulièrement en Oncologie. D’une certaine façon, cette discipline a ainsi pu retrouver ses origines.
Ce néologisme vient de la combinaison des termes « thérapie » et « diagnostic » et décrit une approche qui privilégie le développement conjoint des aspects diagnostiques et thérapeutiques. En visualisant de manière précise le cancer et l’activité tumorale, il est ainsi possible de traiter le patient et sa maladie d’une manière individualisée et ciblée.
Nous utilisons des molécules pour détecter et réaliser des cartographies du corps humain qui sont les mêmes que celles utilisées pour le traitement de la maladie. C’est une approche très ciblée, qui s’inscrit dans le domaine de l’Oncologie personnalisée ou Oncologie de précision.
En Médecine nucléaire, la décision du traitement et sa quantité délivrée est entièrement déterminée par cette cartographie très précise de la distribution de la maladie dans le corps, par opposition à d’autres traitements où on injecte des doses standards.
Les traitements de Médecine nucléaire ont généralement peu d’effet secondaire, justement car ils sont très ciblés et adaptés au patient et à sa maladie.
Actuellement, la majorité des traitements prodigués en Médecine nucléaire concernent le cancer de la prostate. D’autres molécules et d’autres cancers sont les cibles des futurs traitements. Théoriquement, les techniques utilisées actuellement en Médecine nucléaire sont applicables à beaucoup de cancers, pour autant qu’on trouve une façon d’amener une molécule à se localiser dans la zone ciblée ou le type de cancer.
Aujourd'hui, la Médecine nucléaire passe donc d’un domaine confidentiel, avec moins de 1% de médecins choisissant cette spécialité, à une discipline très dynamique et en métamorphose et c’est ce qui est passionnant.
Pour plus d'informations :
A tribute to Dr. Saul Hertz: The discovery of the medical uses of radioiodine (World J Nucl Med. 2019 Jan-Mar; 18(1): 8–12. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6357704/)
The enduring legacy of Marie Curie: impacts of radium in 21st century radiological and medical sciences (Int J Radiat Biol. 2022;98(3):267-275. doi: 10.1080/09553002.2022.2027542. Epub 2022 Feb 2. https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/09553002.2022.2027542)
Theranostics: Nuclear Medicine Revisited’ by Prof. Rodney Hicks https://www.youtube.com/watch?v=CPmCDJ6utuQ
Spécialiste FMH en Médecine Nucléaire
Spécialiste FMH en Radiologie
Physicien EPFL